L’ACTS se réjouit de pouvoir participer aux consultations en vue du budget de 2022. Nous espérons que le gouvernement saisira de la COVID-19 offerte un période pour fixer des objectifs ambitieux.
RECOMMANDATIONS
Que le gouvernement fédéral prenne les quatre mesures suivantes :
- Financer une étude exhaustive du secteur du travail social pour comprendre la main-d’œuvre, identifier les lacunes et répondre aux besoins futurs.
- Financer une étude nationale sur la charge professionnelle des travailleuses et travailleurs en protection de l’enfance.
- Étudier le concept de parité en matière de santé mentale pour le Canada, et la manière dont ce concept pourrait guider les investissements futurs.
- Lancer trois projets pilotes de revenu minimum — dans le nord, en milieu rural et en milieu urbain — en vue de la mise en œuvre éventuelle d’un revenu minimum garanti pour assurer la prospérité des Canadiens dans une économie post-pandémique ou endémique.
L’Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux (ACTS) est la porte-parole de la profession du service social au Canada. Cette fédération nationale fondée en 1926 regroupe 10 organisations partenaires dans les provinces et territoires.
Le Canada vit des heures décisives : alors que nous nous éloignons de l’apogée de la pandémie, les problèmes cruciaux liés aux aides sociales du Canada n’ont jamais été aussi évidents, tout comme la façon dont ces aides manquent le plus cruellement à certains groupes. Dans le même temps, le public s’accorde à dire que le retour à la normale ne suffit pas. Le soutien du public au financement des aides sociales n’a jamais été aussi fort. En effet, un récent sondage Angus Reid a révélé que le déficit et les dépenses gouvernementales ne se classent plus parmi les trois principales préoccupations des électeurs. Cette conjoncture représente pour ce gouvernement une occasion unique de faire des investissements qui permettront au Canada non seulement de se rétablir, mais aussi de prospérer. De plus, nous demandons instamment à ce gouvernement de placer la réconciliation au cœur de son travail, en suivant l’exemple des peuples, des communautés et des organisations autochtones, en respectant réellement la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et en continuant d’agir sur les recommandations de la Commission de vérité et de réconciliation.
L’expérience de première ligne des travailleurs sociaux dans les programmes sociaux et les institutions de notre pays leur confère une expérience cruciale en matière d’inégalités sociales et économiques, de santé physique, de santé mentale et de toxicomanie, de criminalité et de victimisation, ainsi que des conditions nécessaires à l’épanouissement des enfants. Leur rôle et leur formation uniques leur donnent la perspective nécessaire pour assurer efficacement l’équité et la justice pour tous ceux qui vivent au Canada. Malgré la mise en place de certains éléments politiques essentiels pour commencer à s’occuper du bien-être de tous les Canadiens à travers le pays, comme les stratégies nationales pour le logement et la réduction de la pauvreté, même si la pandémie s’estompe, le Canada restera en crise si ce gouvernement ne pense pas au-delà de la reprise — nous devons plutôt nous efforcer d’assurer un avenir juste, audacieux et nouveau.
RECOMMANDATIONS
Soutenir les travailleuses et travailleurs sociaux pour de meilleurs résultats sociaux.
- Financer une étude exhaustive du secteur du travail social pour comprendre la main-d’œuvre, identifier les lacunes et répondre aux besoins futurs.
À l’heure actuelle, nous connaissons mal le nombre de travailleuses et de travailleurs sociaux, ou la proportion de travailleuses et travailleurs sociaux actifs dans les divers champs de pratique et, surtout, si cette main-d’œuvre a la capacité de répondre aux besoins actuels ou prévus des Canadiens : nous manquons de renseignements clés sur la démographie, le marché du travail et la formation. La dernière étude de ce type, Un besoin critique, remonte à l’année 2000.
Une étude sectorielle complète est nécessaire afin de soutenir le recrutement et la rétention, d’appréhender les réalités et les projections en matière d’éducation et de formation, et de fournir une base pour les stratégies visant à garantir une forte main-d’œuvre en travail social à l’avenir. La COVID-19 n’a fait qu’accroître le besoin de travailleuses et de travailleurs sociaux inscrits (TSI). Ceux-ci jouent une myriade de rôles essentiels dans nos communautés, qu’il s’agisse des hôpitaux, de la santé mentale, de la protection de l’enfance, des soins de santé ou de la toxicomanie, pour n’en citer que quelques-uns. En tant que membres à part entière des équipes interdisciplinaires de soins de santé, nous avons besoin d’une étude sectorielle pour nous assurer que la main-d’œuvre professionnelle en travail social puisse répondre aux besoins croissants du Canada en matière de santé et de services sociaux. Les trois piliers de la profession de travailleur social, le Conseil canadien des organismes de réglementation du travail social (CCORTS), l’Association canadienne pour la formation en travail social (ACFTS) et l’Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux (ACTS) s’accordent à dire qu’une étude sectorielle approfondie est essentielle. Les trois sont prêts à travailler en collaboration avec le gouvernement du Canada pour réaliser cette initiative.
Budget demandé : de 1 à 1,5 million de dollars
- Financer une étude nationale sur la charge professionnelle en protection de l’enfance
Les enfants et les familles souffrent lorsque les travailleuses et travailleurs sociaux sont empêchés de rester à leur poste ou de développer des relations avec les communautés — ce qui a pour conséquence d’augmenter le nombre d’enfants placés et de familles en crise. En 2018, l’ACTS a terminé un important projet de recherche évaluant l’état des travailleuses et travailleurs sociaux dans le domaine de la protection de l’enfance. Elle a découvert les lacunes suivantes qui sont directement à l’origine d’un grand nombre des problèmes vécus à travers le Canada :
- la charge de travail et le nombre de cas excessifs sont des facteurs clés qui incitent les travailleuses et travailleurs sociaux à quitter les postes de protection de l’enfance ;
- les ressources en santé mentale et en mieux-être des organisations sont insuffisantes pour répondre aux traumatismes indirects et à l’épuisement du personnel ;
- il y a un manque troublant de données et d’informations adéquates pour guider la politique et la planification ;
- les exigences administratives accrues alourdissent le fardeau des travailleuses et travailleurs sociaux.
Le rôle des travailleuses et travailleurs sociaux dans la pratique de la protection de l’enfance est de développer des relations avec les communautés pour aider les familles à rester intactes. Dans le climat actuel, avec des charges de travail énormes qui exigent un fardeau administratif écrasant, cet aspect individuel du travail social est souvent relégué aux oubliettes. Les familles qui ont besoin d’interventions de soutien ne sont alors vues qu’une fois qu’un incident fâcheux s’est produit, ce qui entraîne la prise en charge d’un autre enfant.
Nous savons également que les services de protection de l’enfance sont ceux qui réussissent le mieux à garder les familles unies lorsque la collectivité entretient une relation saine et à long terme avec un une travailleuse ou un travailleur social. À l’heure actuelle, le nombre élevé de cas cause une détresse si fréquente que de nombreuses travailleuses sociales et travailleurs sociaux quittent le domaine de la protection de l’enfance, ce qui crée un « effet de porte tournante » qui rompt les relations familiales avec les professionnels, les dissuadant de demander de l’aide en amont.
Il n’y a toujours pas de normes nationales régissant le nombre de cas dans les pratiques de protection de l’enfance. Les outils permettant de mesurer la taille et la complexité des cas varient d’une région à l’autre. Les pratiques et les réussites varient également. Il n’y a pas eu d’étude nationale au Canada pour aider les organismes de protection de l’enfance, tant dans les réserves qu’à l’extérieur, à déterminer une charge de travail saine et appropriée, ou comment retenir et protéger le bien-être des travailleuses et travailleurs sociaux. Une étude nationale sur la charge de travail en protection de l’enfance appuiera l’intention du gouvernement du Canada de soutenir une réforme à long terme du système de protection de l’enfance au Canada, particulièrement en ce qui a trait au processus de réconciliation.
Budget demandé : de 2 à 2,5 millions de dollars
Au-delà de la « reprise », vers la croissance et la transformation
- Étudier le concept de Soins de santé mentale et de dépendances pour tous
Si la pandémie a mis en évidence et exacerbé les problèmes de santé mentale et de dépendances au Canada, les problèmes fondamentaux sont bien antérieurs à la COVID-19. Avec une nouvelle ministre de la Santé mentale et des Dépendances, et un nouveau transfert à l’horizon, c’est le moment idéal pour explorer le concept de parité en santé mentale et la façon dont ce concept pourrait guider les investissements futurs.
Bien que la parité soit l’idée simple que tous ceux qui vivent au Canada devraient avoir accès aux services de santé mentale et de dépendances de la même manière qu’ils peuvent compter sur les services de santé physique, la complexité se trouve, comme toujours, dans les détails.
Nous recommandons que le parlement et le gouvernement entreprennent une étude majeure du concept de parité en santé mentale afin de déterminer la meilleure façon d’atteindre cet objectif important par le biais d’investissements existants et nouveaux.
- Lancer trois projets pilotes de revenu minimum garanti — dans le nord, en milieu rural et en milieu urbain — en vue de la mise en œuvre éventuelle d’un tel revenu minimum pour assurer la prospérité des Canadiens dans une économie post-pandémique ou endémique.
L’ACTS demande au gouvernement fédéral de profiter de cette occasion pour lancer trois projets pilotes de revenu minimum garanti en utilisant le projet pilote annulé de l’Ontario comme modèle dans une communauté nordique, une communauté rurale et une communauté urbaine à travers le Canada. Ce travail viendrait compléter la stratégie nationale de réduction de la pauvreté du Canada, qui utilise la mesure du panier de consommation pour déterminer le niveau de vie de base et qui dépend de la géographie. Sachant que le gouvernement actuel met l’accent sur des dépenses prudentes et responsables, de tels projets pilotes fourniraient la base nécessaire à la mise en œuvre d’un revenu minimum complet dans tout le Canada.
Le succès d’expériences telles que le projet MINCOME du Manitoba dans les années 1970 et le projet pilote plus récent de l’Ontario prouvent que les investissements initiaux dans les personnes qui ne dépendent pas d’un examen des ressources sont les plus efficaces et les plus rentables. Le revenu minimum étant un moyen efficace et efficient d’atténuer l’insécurité des revenus, il réduirait également les coûts sociaux et financiers à long terme de la pauvreté dans des domaines tels que les soins de santé, la protection de l’enfance et la justice pénale. En effet, le Bureau du directeur parlementaire du budget a évalué le coût d’un revenu minimum garanti basé sur le modèle ontarien, et a constaté qu’il profiterait à plus de 7,5 millions de Canadiens, avec un coût par habitant estimé à ~10 000 $ par an. Le BDPR note cependant que le coût net serait fortement réduit, car un revenu minimum commencerait à remplacer de nombreuses aides existantes telles que les transferts provinciaux pour les personnes et les familles à faible revenu et les crédits d’impôt. C’est non seulement réalisable, mais nécessaire pour les Canadiens.
Un revenu minimum garanti contribuerait également à réduire les taux croissants de violence entre partenaires intimes, car de nombreuses personnes sont contraintes de rester dans des situations dangereuses pour des raisons financières. En outre, il commencerait à s’attaquer aux inégalités économiques systémiques que les politiques inefficaces, malavisées ou délibérément préjudiciables ont créées pour les personnes racialisées.
Beaucoup trouvent ces preuves convaincantes. Dans le monde entier, des pays comme le Brésil, la Finlande, l’Allemagne, l’Espagne et les Pays-Bas, entre autres, expérimentent tous ce concept. Chez nous, le soutien au revenu minimum garanti est non partisan, avec une motion de la députée néo-démocrate Leah Gazan et un projet de loi d’initiative parlementaire de la députée libérale Julie Dzerowicz. En outre, plus de 50 sénateurs canadiens ont exhorté le gouvernement, l’année dernière, à mettre en œuvre un revenu minimum avec un comité spécial créé à l’Île-du-Prince-Édouard pour réclamer un tel revenu dans leur province.
Alors que le public continue de se demander pourquoi les Canadiens ont été jugés dignes d’un revenu minimum sous la forme d’une PCU au plus fort de la pandémie, mais peu méritants lorsqu’ils étaient confrontés à une myriade d’autres défis sérieux de la vie y compris les pandémies « fantômes » telles que l’itinérance, la pauvreté, la violence entre partenaires intimes, la toxicomanie, et plus encore — le soutien à l’idée d’un revenu minimum augmente alors que les électeurs sont de moins en moins préoccupés par les dépenses gouvernementales. Le moment est venu de franchir cette nouvelle étape dans le soutien aux Canadiens.