L’honorable Marco Mendicino, C.P., député
Ministre de la sécurité publique
Chambre des communes
Ottawa ON
K1A 0A6
27 Juin 2023
Obj. : Valeurs de la Charte, État de droit et Utilité des services correctionnels
Monsieur le Ministre,
Certains membres des Associations nationales intéressées à la justice criminelle (ANIJC) prennent la plume à la suite du transfert polémique d’un détenu, passant d’un établissement pénitentiaire à sécurité maximale à une institution à sécurité moyenne. Ce transfert, sujet de vives discussions dans les médias, vous concerne directement ainsi que vos pairs du Parlement.1
Nous reconnaissons d’emblée la profonde douleur que ces discussions peuvent engendrer chez les familles et les proches des victimes. Parallèlement, il nous incombe de souligner l’importance des valeurs de la Charte des droits de l’homme ainsi que de l’État de droit, principes phares qui devraient éclairer les opérations correctionnelles partout au pays.
Le Service correctionnel du Canada (SCC) a pour rôle « de mettre en œuvre les peines [fédérales] imposées par les tribunaux en assurant la détention et la surveillance des délinquants de manière sécuritaire et humaine, tout en favorisant la réinsertion de ces mêmes délinquants […] grâce à des programmes adaptés ». En outre, il est guidé par sa propre déclaration de valeurs qui le contraint à respecter les principes de respect, d’équité, de professionnalisme, d’inclusivité et de responsabilité « même dans les situations les plus éprouvantes ».2
Il est crucial que la législation et les politiques pénales, influençant le destin de milliers de personnes à travers le Canada, ne s’appuient pas sur une ou deux affaires largement médiatisées. Il serait tout aussi erroné de laisser l’opinion publique et l’émotion dicter la politique dans le domaine de la justice pénale et des services correctionnels. Pour être efficace et inspirer la confiance de tous les Canadiens en l’administration du droit pénal et de la justice, celle-ci se doit de respecter les normes internationales, d’honorer les valeurs de la Charte et de se baser sur des faits concrets et expériences réelles. Elle doit s’appliquer à tous de manière égalitaire et cohérente, indépendamment du statut de la personne. Toute autre approche politise la réalité de tant d’individus déjà marqués par les préjudices, la victimisation et leur implication dans le système de justice pénale.
Éduquer le public renforce la sécurité publique et soutient une politique robuste en matière de justice pénale et d’administration pénitentiaire. Nous savons combien il est ardu d’accroître la compréhension des mécanismes de la justice et des services correctionnels, mais cela reste un pas nécessaire vers la création de communautés informées, empathiques et résilientes que nous aspirons à bâtir. C’est pourquoi nous vous pressons d’exploiter cette occasion pour sensibiliser le public et renforcer l’éducation des citoyens en faveur du SCC, de la sécurité publique et de la confiance du public, conformément à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. En omettant de fournir des données et des informations précises, nous faillirions à notre devoir envers tous les Canadiens.
C’est dans cet esprit que nous tenons à mettre l’accent sur les points suivants
- L’adoption de mesures les moins restrictives contribue à préserver le respect de la Charte des droits et libertés et à combattre les traitements cruels et inhabituels dans les prisons.
- Les prisons à sécurité moyenne et maximale sont des endroits qui font l’objet d’un contrôle et d’une sécurisation constants.
- La notoriété d’une affaire ne saurait prendre le dessus sur les conclusions d’une évaluation sans parti pris des risques et des besoins lors de décisions concernant le niveau de sécurité.
- Les personnes vulnérables et marginalisées sont celles qui subissent le plus de dommages lorsque nous dérogeons à nos principes fondamentaux et à nos lois.
Nous vous enjoignons, ainsi que vos collègues, à méditer sur les valeurs et les principes que nous désirons défendre en tant que Canadiens. Nous espérons que vous placerez entre les mains du commissaire de l’administration pénitentiaire et de son équipe l’immense devoir de garantir la sécurité publique. Non seulement à travers la prise en charge des personnes incarcérées, mais aussi par la sensibilisation du public à travers des actions de communication et d’éducation qui responsabilisent nos communautés.
L’ANIJC et ses membres se feront une joie de discuter avec vous de ces questions ou d’autres questions relatives à la justice pénale, ou de soutenir les initiatives du gouvernement fédéral en matière de sensibilisation. N’hésitez pas à me téléphoner directement au 613-761-1032 ou à m’écrire au naacj@naacj.org si vous souhaitez en savoir plus.
Cordialement,
Tom Best Clubs de lecture pour détenus |
Emilie Coyle Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry |
Anita Desai Société Saint-Léonard du Canada |
Ken Grahlman Comité central mennonite du Canada |
Susan Haines ANIJC |
David Henry Association des agences de réadaptation sociale du Québec |
Catherine Latimer Société John Howard du Canada |
George Myette 7th Step Society of Canada |
Fred Phelps Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux |
Pamela M. Yates, Ph.D., R.Psych Société canadienne de psychologie |
Cliff Yumansky CoSA Canada |
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1 L’ANIJC rassemble 20 organisations membres du secteur bénévole qui contribuent à un système de justice pénale humain, juste, équitable et efficace. Elle défend les droits de la personne et s’engage dans la recherche, le développement social et les approches socialement responsables de la justice.
Les opinions exprimées dans cette lettre peuvent être interprétées comme étant uniquement celles des organisations membres qui l’ont signée et ne peuvent être attribuées à d’autres membres de l’ANIJC. Les Native Counselling Services of Alberta, bien qu’ils soient des membres actifs de l’ANIJC, ne sont pas parties prenantes à cette lettre ouverte.
2 Service correctionnel du Canada Déclaration de mission et de valeurs.
3 L’incarcération d’un homme dans un établissement de sécurité moyenne coûte également beaucoup moins cher que dans un établissement de sécurité maximale. L’Aperçu statistique du système correctionnel et de la mise en liberté sous condition de 2021 nous indique que cela coûte 174 939 $ par an, soit 44,5 % de plus, pour que cet homme soit dans un établissement à sécurité maximum, comparé à 111 243 $ dans un établissement à sécurité moyenne.
Cc
Gary Anandasangaree, Secrétaire parlementaire du ministre de la Justice gary.anand@parl.gc.ca
Yves-François Blanchet, leader, Bloc Québécois (BQ) Yves-Francois.Blanchet@parl.gc.ca
Talal Dakalbab, sous-ministre adjoint, Direction générale de la criminalité et de la prévention, Sécurité publique Canada Talal.Dakalbab@PS-SP.GC.CA
Pam Damoff, secrétaire parlementaire, ministre de la Sécurité publique pam.damoff@parl.gc.ca
Raquel Dancho, porte-parole de l’opposition, Sécurité publique raquel.dancho@parl.gc.ca
Anita Desai, présidente de l’ANIJC et directrice générale de la Société Saint-Léonard du Canada anita@stleonards.ca
L’honorable Mark Holland, leader du gouvernement à la Chambre des communes mark.holland@parl.gc.ca
Peter Julian, leader parlementaire et porte-parole du Nouveau parti démocratique (NPD), Sécurité publique peter.julian@parl.gc.ca
Anne Kelly, Commissaire, Service correctionnel du Canada anne.kelly@csc-scc.gc.ca
L’honorable David Lametti, ministre de la Justice et procureur général du Canada david.lametti@parl.gc.ca
Alistair MacGregor, porte-parole du NPD, Alistair.MacGregor@parl.gc.caElizabeth May, députée, elizabeth.may@parl.gc.ca
Kristina Michaud, porte-parole du BQ, Sécurité publique et Protection civile, Kristina.Michaud@parl.gc.ca
L'honorable Pierre Poilievre, chef, Parti conservateur du Canada pierre.poilievre@parl.gc.ca
L’honorable Andrew Sheer, leader parlementaire Andrew.Scheer@parl.gc.ca
Jagmeet Singh, chef du NPD Jagmeet.Singh@parl.gc.ca
Alain Therrien, leader parlementaire Alain.Therrien@parl.gc.ca
Shawn Tupper, sous-ministre, Sécurité publique Canada shawn.tupper@ps-sp.gc.ca
Chad Westmacott, directeur général, Direction de la sécurité communautaire, de l’administration pénitentiaire et de la justice pénale, Sécurité publique Canada chad.westmacott@ps-sp.gc.ca
Reem Zaia, directrice de la politique, cabinet du ministre de la Sécurité publique Reem.Zaia@ps-sp.gc.ca
Commission permanente de la justice et des droits de la personne, (JUST) JUST@parl.gc.ca
Comité permanent de la sécurité publique et nationale (SECU) SECU@parl.gc.ca
Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (LCJC) lcjc@sen.parl.gc.ca
Comité sénatorial permanent des droits de la personne (RIDR) ridr@sen.parl.gc.ca